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.Ils semblaient avoir les mains vides.En fait, ils avaient tout abandonné : leurs abris et leurs outils.Ils s’étaient levés et ils étaient partis en direction de l’est, voilà tout.Pourquoi ?— Ils nous ont laissés, gémit Maxie.Emma leva les yeux vers le ciel immense.Des nuages passaient devant le soleil.Un flocon lui toucha la joue.Quelque chose tombait du ciel, flottant comme de la neige très légère.Maxie se mit à courir en gazouillant de joie.Emma tendit la main et laissa un flocon s’y poser.Il n’était pas froid : en fait, ce n’était pas du tout de la neige.C’était de la cendre.— Nous devons partir, hein ? demanda Sally à contrecœur.— Oui, il le faut.— Mais, si nous partons d’ici, comment nous trouveront-ils ?Ils ? Qui ça, « ils » ? Emma trouvait la question presque comique.Mais elle savait que Sally la prenait très au sérieux.Elles avaient passé de longues heures à draper la soie du parachute d’Emma sur des cailloux et en haut des arbres dans l’espoir que ses couleurs vives attireraient l’attention de quiconque se trouverait en l’air, ou même en orbite.Et elles avaient travaillé à fabriquer un immense rectangle avec des cailloux de couleur pâle.Rien de tout ça n’avait eu le moindre foutu résultat.Rester près de l’endroit où elles avaient émergé de la porte en forme de roue était tout de même plutôt logique.Après tout, qui pouvait dire qu’elle n’allait pas réapparaître un jour, aussi subitement qu’elle avait disparu, porte magique s’ouvrant pour les ramener à la maison ?Et, en outre, il y avait le fait que, si elles devaient partir avec les Coureurs – si elles devaient marcher vers l’inconnu en compagnie de ces grands échalas pas tout à fait humains –, eh bien, elles auraient l’impression d’abandonner : ce serait comme dire qu’elles avaient uni leur sort au leur, qu’elles avaient accepté que c’était là leur vie, désormais, une vie faite d’abris grossiers, de baies de la forêt et, si elles avaient de la chance, de morceaux de viande rouge à moitié mâchée.Et que cette vie-là serait la même pour le restant de leurs jours.Mais Emma ne voyait absolument pas ce qu’elles pouvaient faire d’autre.Elles trouvèrent un compromis.Elles passèrent une demi-heure à rassembler les cailloux les plus gros et les plus brillants qu’elles étaient capables de porter et à les disposer de manière à former une grande flèche indiquant l’est à partir du foyer rudimentaire des Coureurs.Puis elles emballèrent tout ce qu’elles pouvaient porter dans des morceaux de soie de parachute et suivirent les traces qu’ils avaient laissées.Emma s’assura qu’elles passaient au loin d’un petit tas d’os qu’elle aperçut, un peu à l’écart.Elle était heureuse que Sally n’eût jamais pensé à poser des questions trop précises sur ce qu’il était advenu du corps de son mari.Les jours défilèrent.Leur piste sinuait autour des obstacles naturels – un marécage, une zone de forêt dense, une autre aride et dépourvue d’arbres – mais Emma voyait bien qu’ils se dirigeaient plus ou moins vers l’est, s’éloignant de la menace du nuage volcanique.Les Coureurs semblaient préférer la savane herbeuse parsemée d’arbres et changeaient d’itinéraire pour rester sur ce type de terrain.Emma reconnut que ces espaces semblables à des parcs lui procuraient un sentiment de sécurité, à elle aussi, bien plus que la forêt dense ou les plaines ininterrompues.Peut-être n’était-ce pas une coïncidence si les humains créaient des parcs qui leur rappelaient, à un niveau très profond, ce genre de paysage.J’imagine que nous transportons tous un peu d’Afrique en nous, pensa-t-elle.Elle n’était pas experte en botanique, africaine ou autre.Mais elle avait vraiment l’impression qu’il y avait beaucoup d’arbres proches des fougères et peu de plantes à fleurs, comme si la flore de ce lieu était plus primitive que sur Terre.Une promenade au jurassique, donc.En ce qui concernait la faune, elle aperçut des troupeaux de créatures ressemblant à des antilopes.Certaines, minces et agiles, pouvaient bondir lorsque les Coureurs approchaient, mais d’autres, plus grosses, plus maladroites, avec plus de fourrure, traversaient la savane en troupeaux au pas lourd.Ces animaux se tenaient à distance, ce dont elle était reconnaissante.Mais elle ne leur trouvait pas l’air typiquement africain.Elle ne voyait pas d’éléphants, ni de zèbres, ni de girafes.(De toute façon, se dit-elle, il n’y a presque plus d’éléphants en Afrique.)Il était clair qu’il y avait des prédateurs partout.Emma entendit une fois résonner le rugissement rauque de ce qui devait être un lion.Elle repéra un ou deux félins qui se faufilaient dans les buissons en bordure de forêt : peut-être des léopards.Et ils rencontrèrent un troupeau – non, une compagnie d’énormes oiseaux carnivores à l’air vicieux.Ces créatures, qui ne volaient pas, se déplaçaient en un groupe compact et étrangement nerveux, donnant des coups de becs sur le sol et grattant leurs plumes et leurs joues à l’aide de griffes semblables à des cimeterres.Leur comportement, quoique très proche de celui des oiseaux, était effrayant chez de si grandes créatures.Les Coureurs s’abritèrent dans une zone boisée pendant une bonne demi-journée jusqu’à ce que la compagnie soit passée.Ils les appelaient les « oiseaux tueurs ».Maxie, les yeux écarquillés, les appelait des « dinosaures ».Ils ressemblaient effectivement à des dinosaures, se dit Emma.Les oiseaux étaient leurs descendants, bien sûr.Et ici, à cause d’elle ne savait quelle logique environnementale, ils avaient perdu la faculté de voler et oublié comment chanter, mais, retrouvant leur puissance et leur apparat, ils étaient redevenus les seigneurs des lieux.La démarche des Coureurs n’était pas tout à fait humaine.Leur cage thoracique paraissait haute et quelque peu conique, plus semblable à celle des chimpanzés qu’à celle des humains, et leurs hanches étaient très étroites, si bien que chaque Coureur était une mince silhouette à l’équilibre délicat avançant à grands pas sur de longues jambes.Emma se demandait quels problèmes l’étroitesse de hanches pouvaient bien provoquer lors des naissances.La tête des Coureurs n’était pas beaucoup plus petite que la sienne.Mais il n’y avait pas de sages-femmes ici, et pas de péridurale non plus.Peut-être les femmes s’aidaient-elles mutuellement.Chacune d’elles connaissait ses propres enfants, c’était certain – contrairement aux hommes, qui semblaient les considérer comme de petits compétiteurs irritants.Les femmes semblaient même utiliser le sexe pour se lier entre elles [ Pobierz całość w formacie PDF ]