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.Il a alors abandonné la dépanneuse dans les champs, non loin de la maison, et repris le van pour aller chez Reba McClane.Quand elle est sortie saine et sauve de la maison, il est allé chercher la dynamite à la cave et a mis le feu à l’essence avant de sortir par-derrière.Il a ramené la dépanneuse à la station-service et pris la voiture de Lang.Tout était prévu.« Cette histoire m’a rendu dingue tant que je n’ai pas trouvé la solution.Et j’ai su que j’avais raison quand on a retrouvé ses empreintes sur le cabestan de la dépanneuse.« Nous l’avons probablement croisé sur la route en nous rendant chez lui.Oui, madame, j’arrive.Oui, oui.»Graham voulut lui poser une question, mais il était trop tard.Molly entra dans la chambre.Graham lui écrivit : » Je t’aime » sur le bloc de Crawford.Elle hocha la tête et lui prit la main.Une minute plus tard, il écrivit à nouveau.« Willy en forme ? »Elle hocha la tête.« Ici ? »Elle détourna la tête un peu trop rapidement.Elle lui envoya un baiser et lui désigna l’infirmière qui venait la chercher.Il la retint par le pouce.« Où ? » insista-t-il, en soulignant deux fois ce mot.« Dans l’Oregon », dit-elle.Crawford lui rendit une ultime visite.Graham avait déjà préparé sa question.» Dentier ? »« C’était celui de sa grand-mère, dit Crawford.La police de Saint Louis a retrouvé un certain Ned Vogt – la mère de Dolarhyde était la belle-mère de Vogt.Vogt avait vu Mme Dolarhyde quand il était gosse et il n’avait jamais oublié ses dents.« C’est pour cela que je t’appelais quand tu es tombé sur Dolarhyde.Le Smithsonian venait de m’appeler.Les autorités du Missouri leur avaient enfin transmis les dents.Ils ont remarqué que la partie supérieure était faite de vulcanite au lieu d’acrylique.On ne fait plus de dentiers en vulcanite depuis trente-cinq ans.« Dolarhyde avait un dentier neuf en acrylique, c’était la copie exacte de l’autre mais il pouvait le porter.On l’a retrouvé sur son cadavre.Le Smithsonian l’a étudié de près, ils disent qu’il est de fabrication chinoise.L’autre dentier était suisse.« Il avait également sur lui la clef d’un coffre-fort de Miami.On y a découvert une sorte de gros registre – un drôle de truc.Il est à ta disposition.« Ecoute, mon vieux, il faut que je rentre à Washington.Je redescendrai te voir pendant le week-end si je peux.Ça va aller ? »Graham dessina un point d’interrogation, puis le raya et écrivit : » Parfait.»L’infirmière arriva après le départ de Crawford.Elle lui fit une intraveineuse de Demerol et la pendule se brouilla.Il se demanda si le Demerol agissait sur les sentiments.Il pourrait retenir Molly quelque temps, jusqu’à ce qu’on lui refasse le visage.Mais la retenir pour quoi ? Il se sentait partir à la dérive et espérait qu’il ne rêverait pas.Il flotta tout de même, entre le rêve et le souvenir.Mais ce n’était pas si désagréable que ca.Il ne rêva ni au départ de Molly ni à Dolarhyde.Ce fut une sorte de souvenir onirique de Shiloh interrompu par des lumières braquées sur son visage ou le sifflement du tensiomètre.C’était au printemps, peu de temps après la mort de Garett Jacob Hoobs, qu’il avait visité le site de Shiloh.Par un beau matin d’avril, il avait traversé la route bitumée qui mène au Bloody Pond – l’Etang Sanglant.Les jeunes pousses d’herbe d’un beau vert clair formaient un tapis qui descendait jusqu’à la pièce d’eau.Il y avait eu une crue et la pelouse était encore visible sous l’eau, elle semblait tapisser le fond de l’étang.Graham savait ce qui s’était passé ici en avril 1862[5].Il s’assit sur l’herbe en dépit de l’humidité.Une voiture de touristes passa ; quand elle eut disparu, Graham aperçut quelque chose qui bougeait sur la route.La voiture avait brisé la colonne vertébrale d’une petite couleuvre.Elle se tordait en tous sens au milieu de la route, dévoilant parfois son dos sombre et parfois son ventre pâle.La terrible présence de Shiloh lui glaçait les sangs, alors même que le soleil printanier le faisait transpirer.Graham se leva, le pantalon mouillé.Il avait la tête vide.La couleuvre continuait de se tordre.Graham la saisit par l’extrémité de la queue et la fit claquer comme un fouet.La cervelle éclata pour retomber dans l’étang.Une brème la happa.Il avait cru Shiloh hanté, avec sa beauté sinistre comme un étendard.Et maintenant, à mi-chemin entre le rêve et le sommeil dû aux narcotiques, il découvrait que Shiloh n’avait rien de sinistre ; il était indifférent, c’est tout.Shiloh l’admirable pouvait tout voir.Son inoubliable beauté soulignait tout simplement l’indifférence de la nature, ce Vert Engrenage.Le charme de Shiloh se moque bien de notre désarroi.Il s’éveilla et découvrit la pendule insouciante, mais il ne put s’empêcher de penser.Le Vert Engrenage ne connaît pas la pitié ; c’est nous qui créons la pitié et l’élaborons dans les excroissances de notre cerveau reptilien.Le meurtre n’existe pas.C’est nous qui l’inventons, et c’est à nous seuls qu’il importe.Graham ne savait que trop bien qu’il réunissait en lui tous les éléments pouvant donner naissance au meurtre ; et aussi, peut-être, à la pitié.Et sa compréhension du meurtre avait quelque chose de dérangeant.Il se demanda si, dans ce corps immense qu’est l’humanité, dans l’esprit des hommes civilisés, les forces malignes que nous retenons en nous et la redoutable connaissance instinctive de ces mêmes forces n’ont pas la fonction de ces virus affaiblis contre lesquels s’arme le corps humain.Il se demanda si ces forces anciennes, terribles, ne sont pas les virus d’où naissent les vaccins.Oui, il s’était trompé à propos de Shiloh.Shiloh n’est pas un lieu hanté – ce sont les hommes qui sont hantés.Shiloh s’en moque bien [ Pobierz całość w formacie PDF ]